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Des comptes clairs et des informations complètes : un gage de succès pour le recouvrement des charges de copropriété

Publié le 05 Septembre 2023

Le paiement des charges de copropriété nécessite l’établissement de décomptes clairs et toutes lesninformations utiles à la bonne compréhension des comptes doivent être transmises aux copropriétaires. La communication de la valeur de la quote-part dans le fonds de réserve, à l’occasion de la vente d’un lot, permet d’éviter toute difficulté et la mise en cause de la responsabilité éventuelle de l’association des copropriétaires. C’est ce que rappelle un jugement du Tribunal de première instance francophone de Bruxelles du 10 janvier 2023, statuant en degré d’appel1.

Recouvrement des charges de copropriété et charge de la preuve

On ne le rappellera jamais assez : l’association des copropriétaires qui agit en recouvrement des charges de copropriété doit prouver l’existence de sa créance. En justice, la partie demanderesse supporte la charge de la preuve. Il ne suffit donc pas de produire un historique comptable pour justifier de la créance de la copropriété, il faut encore présenter les décomptes, de manière claire, sur toute la période concernée et répondre au besoin aux interrogations du copropriétaire.

Dans la décision du 10 janvier 2023, le juge refuse de faire droit à la demande de l’association des copropriétaires portant sur le paiement d’un solde de charges dues par des copropriétaires vendeurs, au motif que les décomptes ne sont pas clairs et que l’association n’a pas apporté les explications déjà sollicitées devant le juge de paix. La copropriété se contentait de renvoyer à ses décomptes en invoquant qu’ils avaient été approuvés par différentes assemblées générales.

Même si l’approbation des comptes est souvent considérée comme un élément déterminant pour asseoir la revendication de la copropriété quant au paiement des charges, il faut aussi vérifier la portée exacte de la décision. L’approbation des comptes généraux a pour effet de valider les dépenses engagées par le syndic. Une telle approbation ne porte pas sur la répartition des charges entre les différents copropriétaires et leur imputation. Le syndic veillera, lorsqu’il définit l’ordre de jour de l’assemblée générale appelée à approuver les comptes, à préciser qu’elle porte tant sur les comptes généraux que les décomptes individuels, en se réservant la preuve de leur communication préalable. On ne peut en effet approuver que les éléments dont on a pu prendre connaissance.

Le jugement ne permet toutefois pas de savoir ce qui était précisément contesté par les anciens copropriétaires et en quoi les décomptes manquaient de clarté. Le tribunal relève qu’« aucune explication satisfaisante n’est à l’heure actuelle apportée par l’ACP quant à la composition exacte des décomptes sur le plan des frais communs et/ou des postes qui n’ont toujours pas été clarifiés ». Le manque de collaboration de la copropriété semble avoir été sanctionné, en refusant de condamner les anciens copropriétaires au paiement des charges dont ils restaient redevables.

Le fonds de réserve

Dans le cadre de la procédure, les anciens propriétaires reprochaient à l’ACP de ne pas avoir communiqué la valeur de leur quote-part dans le fonds de réserve, les empêchant de répercuter ce montant lors de la vente de leur bien. Ils sollicitaient dès lors le paiement par l’ACP de cette somme.

Rappelons que, dans les rapports entre le vendeur et l’ACP, la quote-part dans le fonds de réserve reste acquise à la copropriété. Lors de la vente, aucun remboursement n’intervient à ce titre, à la différence de la quote-part dans le fonds de roulement. Cependant, dans les rapports entre le vendeur et l’acquéreur, ceux-ci peuvent convenir entre eux d’un tel remboursement.

Le tribunal rejette la demande, relevant, des termes du compromis et de l’acte authentique, que toutes les informations utiles avaient été communiquées lors de la vente et que les vendeurs étaient donc parfaitement informés des montants qu’ils avaient réglés à titre de contribution dans le fonds de réserve. Aucune faute n’est donc démontrée dans le chef de l’ACP.

Le fonctionnement des associations des copropriétaires repose sur une saine et adéquate gestion financière. L’argent est en effet le nerf de la guerre. Cette gestion incombe, suivant la loi sur la copropriété, au syndic qui peut agir, sans décision de l’assemblée générale, en recouvrement des charges. Pour ce faire, il est impératif que ces comptes soient établis de manière claire et que le syndic soit en mesure de donner toutes les informations et explications utiles aux copropriétaires. Il lui appartient de faire approuver les comptes, dans ces différents aspects. Tout manquement à ses obligations relatives à la gestion financière est préjudiciable à la copropriété et la responsabilité de l’ACP et celle du syndic peuvent être engagées. Autant le savoir…

Article rédigé par Corinne Mostin, 4LAW - Avocate au barreau de Bruxelles - Médiatrice civile et commerciale aggréée

 

 

Article issu de la rubrique "L'Avis du Juge" du Federiamag n°34

En collaboration avec 

  

1 R.C.D.I., 2023/2, p. 23.

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